jeudi 16 janvier 2014

Adddictions

θ    TOUS ADDICTS?                                                         

         Addictions aux aliments, aux jeux, aux scarifications, à la cigarette,  à internet...Dès qu'un comportement est répétitif, on le dit "addictif". Mais qu'est ce qui caractérise une véritable addiction? 

sommaire:
- ÉTYMOLOGIE
- DÉFINITION POUR UNE THÉORIE
- COMPRENDRE POUR MIEUX PRÉVENIR:
           quelles sont les dangers des drogues 
           le cube de la dangerosité pharmacologique 
           les satisfactions recherchées 

- SORTIR DES IMPASSES DE LA PRÉVENTION CONVENTIONNELLE
- ADDICTION "AUTO-THÉRAPIE"?
- UNE PRISE EN CHARGE DIFFICILE ET PLURIDISCIPLINAIRE,(BIO-PSY-SOCIAL)
- UN CHAMP D'ACTION TRÈS VASTE
- QUELQUES CONCLUSIONS

         ÉTYMOLOGIE:

        A l'origine le mot latin ad-dictus est utilisé pour désigné des esclaves romains au corps aliéné et donc littéralement"dits par" le maitre.
        En droit médiéval, est " addicté " le débiteur "contraint par corps" qui ne peut s'acquitter de sa dette. Progressivement le terme apparait dans le champ médical est psychiatrique pour désigner une personne esclave d'un produit
         Au XIX les comportements addictifs sont répertoriés via l'usage du suffixe "manie,
( alcoolomanie, nymphomanie,..),  soulignant qu'il s'agit là d'une folie et d'une énigme.
     Introduit en 1905 le mot "toxicomanie"deviendra toutefois vite inadéquate pour caractériser les formes d'addictions sans drogues.
     La notion d'addiction se répand en psychopathologie en deux temps: d'abord dans les années 1930-1940, avec les premiers post-freudiens, puis par la psychiatrie nord -américaine dans les années 1970.
C'est J Mc  qui implante ce terme dans le langage de la psychanalyse pour évoquer l'ensemble des conduites de dépendances.


      UNE DÉFINITION POUR UNE THÉORIE:

Processus par lequel est réalisé un comportement qui peut avoir pour fonction de procurer du plaisir et de soulager un malaise intérieur, et  qui se caractérise par l 'échec répété de son contrôle et sa persistance en dépit de ses conséquences négatives. et qui conditionne l'organisation du quotidien au détriment de  la vie sociale.(1)

  
     


          En psychanalyse on a longtemps attribué le peu d’attention porté par Freud aux toxicomanies et à l’alcoolisme de part  ses rapports ambigus avec la cocaïne au début de sa carrière.
        Pour être juste, il a tout de même donné des éléments précieux pour notre compréhension. Il a ainsi suggéré que la libido pouvait avoir des effets toxiques quand elle n’était pas liée psychiquement par des fantasmes, et que la masturbation était la première des addictions . 

         C'est Winnicott qui a vraiment donné les clés pour comprendre l’addiction, avec sa notion de phénomènes transitionnels, dans sa formulation la plus aboutie : «Objets transitionnels et phénomènes transitionnels» dans son livre Jeu et réalité (1971).

          Il voit dans l’attachement de l’enfant à ce type d’objets,(transitionnels), la partie mortifiée d’un processus de symbolisation qui va de l’objet qui permet de se rassurer en l’absence de la mère, jusqu’à une série de phénomènes transitionnels, de comportements, qui occupent l’aire intermédiaire entre réalité psychique et réalité extérieure.
Ces phénomènes sont : la création artistique (dont on sait la coexistence fréquente avec les addictions), le jeu, les croyances religieuses, le vol et le mensonge, la toxicomanie, le fétichisme et les rituels obsessionnels. Parmi les phénomènes transitionnels, ll faut donc distinguer ceux qui sont au service de la sublimation, et ceux qui témoignent d’un échec du processus de symbolisation.
La toxicomanie est citée parmi les échecs de l’évolution, une sorte de ratage fétichique, au service du déni de la séparation.
        En résumé, d’après cette conception, une caractéristique propre à tous les cas d’addiction serait de reposer sur un raté du processus de symbolisation, une fixation aux aspects non-vivants de l’aire transitionnelle, renvoyant à un problème de séparation avec la mère non surmonté psychiquement en raison d’une défaillance du cadre familial. La mère créatrice d’illusion, dont naît l’objet transitionnel ,n’a pu remplir son rôle.

          L’addiction commence alors dans l’après-coup de la puberté, alors que l’excitation libidinale en excès, non liée psychiquement, fait sentir son effet toxique sur l’appareil psychique, comme le dit Freud. C’est à ce moment qu’il est fait appel à un équivalent des objets transitionnels d’avant la puberté : le comportement addictif impliquant souvent un aspect inerte, non-vivant, qui témoigne de la tentative de lier l’excitation par un retour au calme artificiel.

            QUELLES SONT LES DANGERS DES DROGUES:

            Les drogues sont des:

-substances chimiques
-psychoactives
-qui modifient le fonctionnement du cerveau

         

             Trois types de dangers:

-Le potentiel de dangerosité toxique:(atteinte physiologique, intoxication, surdose...)
-Le potentiel de modification psychique: (ivresse, excitation, insensibilité, angoisse, troubles   psychiatriques...)
-Le potentiel de risque addictif:(apparition d’une dépendance psychique et physique)


LE CUBE DE LA DANGEROSITÉ PHARMACOLOGIQUE



LES SATISFACTIONS RECHERCHÉES
l’usage des drogues correspond à une recherche de bien (ou de mieux) être :

-Le plaisir: (Sensations psycho-corporelles, euphorie, déréalisation..., d’où la relation avec la fête)
-La socialisation:(entrer des codes sociaux d’un groupe, d’une société..., d’où la relation avec la culture)
-Le soulagement:(propriétés médicinales, apaisement du stress, de la déprime, améliorations des performances, auto-traitement..., d’où la relation avec le dopage, la souffrance et la médecine)



      LE CYCLE DE L'ADDICTION 

  
      SORTIR DES IMPASSES DE LA PRÉVENTION CONVENTIONNELLE

L’addiction n'est pas une maladie, la prévention par les dangers si elle est nécessaire n 'a pas d'impact. 
L’addiction n' est pas un fléau ni une déviance, la prévention par l’interdit, des années 80 n'a pas aboutit.
On nie la part de satisfaction et d’adaptation des conduites addictives, et des capacités d’autocontrôle.
Donc  la prévention intervient à contretemps (quand le problème ne se pose pas) et à contre-courant (alors que l’usager en tire des bénéfices).
  
Si soigner et contrôler vise les souffrances provoquées, prévenir devrait s’intéresser surtout  aux satisfactions procurées (plaisir, soulagement, socialisation) et viser à mieux maîtriser/limiter les risques.


      DES ENQUÊTES ET DES ÉTUDES CONFIRMENT LA NÉCESSITE DE  NOUVELLES PRATIQUES DE PRÉVENTIONS
      
Étude RELION (OFDT-2011)

20 à 30% des éléments du secondaire mènent des actions de prévention le plus souvent ponctuelles (1 à 2h/an)

«La transmission des connaissances sur les risques associés à l’usage des drogues est l’approche dominante (...) Les approches interactives sont bien moins souvent évoquées »L’un des problèmes majeurs est « l’absence de coordination des acteurs » 

Étude « Aventure » (JAMA 2013)

Programme de repérage et d’intervention auprès de jeunes « à risques » (anxiété, impulsivité recherche de sensation...) comparé à programme classique.
« Travailler avec ces jeunes leur bien être et pas seulement les informer sur les dangers des drogues » 
29% de réduction de consommation par rapport au programme classique 
« Apprendre aux jeunes à mieux gérer leur vulnérabilité a un impact sur la gestion de leur  consommation »


       ADDICTION "AUTO- THÉRAPIE": UNE HYPOTHÈSE?


           Le sujet rentre dans l'addiction de par un problème, soit par le besoin de prise de risque,d’éprouver des sensations fortes, soit par le besoin d'apaisement de la souffrance et du malaise, ou même par la conjonction des deux voies.Les jeunes "addicts" sont donc des sujets ayant une vulnérabilité,soit relative à la prise de risque,soit parce qu'ils ont souffert, sont "abimés". Une sensation est mise à la place d'une émotion. Ainsi plutôt que d 'avoir à   gérer une émotion difficile, le sujet préfère se mettre en quête d'une sensation, qui, elle,donne le sentiment d’être maitrisée, et qui est plutôt positive,au moins dans les premiers temps.
         L'addiction permet donc de "court-circuiter" des relations pénibles.Il ne faut pas pour autant négliger l'aspect plaisir inhérent à la prise du produit.
          Le professionnel devra prendre en compte dans sa prise en charge, tant la recherche des souffrances passées du sujet que les bénéfices secondaires de la prise du produit,(plaisir, etc...).

     UNE PRISE EN CHARGE DIFFICILE ET PLURIDISCIPLINAIRE , ( bio-psy-social):

            Bien souvent le  traitement des addictions  s’avère particulièrement délicat.
    Dans un premier temps le traitement médical du manque est indispensable. Une prise en charge psychologique est toutefois incontournable pour délier les mécanismes ayant amené la prise du produit .

       Devant le déni des conséquences pour soi, mais aussi pour son entourage, le jeune se doit de prendre conscience de celles-ci pour se libérer. Ce sera là une étape pénible mais nécessaire pour envisager un nouveau départ dans la réalité.C'est bien sur aussi là que nous nous devons d’être.
      Bien souvent ces jeunes maintiennent une sorte de statu-quo,une ambivalence, ils aimeraient conserver le plaisir tout en laissant les ennuis causés par l'addiction.

         UN CHAMP D'ACTION TRÈS VASTE

LES QUATRES PHASES DE L INTERVENTION PRÉCOCES  (OFSP)

Développer des stratégies de prévention individualisée et d’aides aux plus vulnérables:
Phase 1 Promouvoir et renforcer un environnement favorable
Phase 2 Le repérage
Phase 3 L’évaluation
Phase 4. L’accompagnement

LES 6 MOTS CLEFS DE L INTERVENTION PRÉCOCE

Un exemple de pratiques entre prévention et soins : les Consultations Jeunes Consommations

                 1) La rencontre
     2) L’expérience et sa mise en question
     3) Le repérage                                                                      
     4) L’aide à l’auto-évaluation
     5) L’intervention brève
     6) L’accompagnement au changement

DÉVELOPPER L'INTERVENTION PRÉCOCE EST UNE CONDITION 
D'EFFICACITÉ ET DE PRÉVENTION


- Aller au plus près des personnes en situation de risque, dans leur contexte
- Aider à leur repérage (et non dépistage) et les aider à gérer leur vulnérabilité

  Parce que l’intervention précoce c’est :

- Renforcer leur pouvoir d’agir sur elle-même et leur environnement
- Mobiliser tous les acteurs, accroître leurs compétences et améliorer leur coordination


              QUELQUES CONCLUSIONS

- S’engager dans une (nouvelle) approche politique de la prévention : associant   éducation préventive et intervention précoce sur les « territoires », et favorisant une communauté sociale responsable et compétente.

- Une politique qui ne parte pas d’une idéologie mais qui fédère les différents points de vue ou disciplines, les différentes expériences.

- Élaborer de nouvelles représentations.
 
- Faire émerger de nouvelles pratiques.
 
Il devient capital de faire collaborer les mondes de l’éducation et ceux de la prévention des addictions. 











   
(1)Eric-Pierre TOIBIANA, Addictologie clinique, coll.Quadrige, Paris, Puf, 2011


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